Le comité des jeunes privés d’emploi de la JOC est essentiellement composé de Lucas et d’Anaïs. Lucas a vécu dans la rue suite à une rupture familiale. Petit à petit, il a remonté la pente avec l’aide d’éducateurs rencontrés à SURSO et au Lieu (accueil de moins de 18 ans). Avec le CJPE de la JOC, il veut continuer à agir pour que ses copains et copines s’en sortent à leur tour.
Certains logent chez lui régulièrement pour ne pas être à la rue et sont souvent en mauvaise santé avec des addictions à la drogue ou l’alcool ; pour survivre, ils font la manche. L’un deux fait cracheur de feux mais la police l’arrête régulièrement et il risque d’être jugé et condamné.
Sans logement, sans revenu (les jeunes avant 25 ans n’ont pas droit au RSA), sans permis et en mauvaise santé, il est illusoire qu’ils puissent travailler. Il faut d’abord qu’ils reprennent confiance en eux et dans les autres, leur permettre d’avoir une stabilité et surtout s’engager ensemble dans le dynamisme de projets collectifs. Pour cela, il faut aussi trouver des partenaires capables de soutenir leurs actions.
C’est pourquoi, dans le cadre de la semaine « OSER LA SOLIDARITE », ils ont préparé, le 16 mai, une journée d’animation autour d’un ciné-débat à propos de la situation des jeunes de la rue, avec des travailleurs sociaux. Les échanges furent riches. Nous avons ensuite partagé un buffet froid préparé par les jeunes du CJPE pour montrer leurs talents (plusieurs ont déjà travaillé dans la restauration). Même si Pôle Emploi et Sémaphore n’ont pas été présents, cela a boosté l’équipe et permis, par la suite, d’avoir des contacts utiles avec eux. Une enquêtrice de Sémaphore est venue les voir. Ils ont pu dire comment et pourquoi ils n’avaient pas continué les contacts avec les services de l’emploi (qui ne répondaient pas à leurs besoins), qu’ils n’étaient pas considérés comme des partenaires pour engager des projets, ensemble, à la résolution de leurs problèmes de logement, de revenu, de déplacement, de santé, d’addiction.
Cet été, ils ont fait un micro-trottoir auprès des jeunes de la rue et cela fera peut-être l’objet d’une émission de radio avec une radio locale. Ils ont pris aussi le temps de se détendre en faisant du camping, ont participé à des spectacles offerts dans la région. Est envisagé plus tard d’organiser une table ronde avec des partenaires et des actions auprès des pouvoirs publiques pour changer la situation des jeunes.
Anaïs : « La vie des jeunes est trop difficile, on n’arrive pas à trouver d’emploi ; on ne nous laisse pas notre chance, nous sommes de plus en plus dans la précarité et nous perdons confiance dans les institutions, les associations. On n’a pas vu beaucoup de jeunes mais ce qui est bien, c’est que nous pouvons monter des actions, qu’il y a du possible, aller vers les jeunes, les aider à avancer. Il faut du temps pour leur donner confiance. »
Lucas : « Cette année a été fructueuse en connaissance, on avance petit à petit mais sûrement. Le CJPE cela me fait du bien, cela me permet de développer mes capacités. Je veux permettre à ce que les choses s’améliorent pour mes copains et pour tous. Cela me fait croire que je peux faire quelque chose. »
A partir du texte de la multiplication des pains (Mt 9, 10-17) :
« Ce que je retiens du texte, c’est le partage alors que les disciples n’avaient pas de réponse. Il est attentif à la foule, à ceux qui en ont besoin. Le règne de Dieu, c’est quelque chose de censé, la gentillesse, le partage, la générosité, l’amour… Il guérissait ceux qui étaient perdus, ceux qui ont fait de mauvais choix, ceux qui ont fait le mal mais qui ne le voulaient pas vraiment. Alors que les disciples n’avaient pas de réponse… Ce que je retiens, c’est le partage de chacun et chacune ; le miracle, c’est l’être humain qui le fait par une prise de conscience, une maturité. “Donnez-leur vous-même à manger”, c’est de l’éducation populaire, une dynamique collective, avoir confiance en eux pour régler les problèmes. Jésus montre l’exemple : « Levant son regard vers le ciel », il regarde son Père, il compte sur lui ; « il prononce la bénédiction », il veut du bien à toute cette foule ; « rompit le pain », le geste du partage et demande à ses disciples d’en être les acteurs…. »
Laurent Schneider, accompagnateur des jeunes du CJPE
Pour aller plus loin
Commander le livre de la JOC “La vie devant nous, récits de jeunes privé·e·s d’emploi”