Loic, est privé d’emploi, mais pas d’engagement. D’abord militant à la JOC, il s’est aussi syndiqué à la CGT Chômeurs et précaires. « Prendre sa carte au syndicat », c’est possible, même sans emploi ! Il nous raconte.
- Comment as-tu rencontré la CGT Chômeurs ? Et qu’est-ce qui t’as donné envie de t’engager à leurs côtés ?
J’ai rencontré la CGT grâce a la JOC qui m’a sensibilisée aux questions syndicales. Pour être plus précis au Rassemblement « Droits Devant » à Jambville. A ce moment, je ne me suis pas senti concerné, j’étais privé d’emploi et je pensais que c’était l’engagement dans un parti politique qui pouvait changer les choses. Lors du lancement de la Campagne Nationale d’Action de la JOC sur l’emploi digne, un responsable de la JOC était présent et nous avons échangé sur les privés d’emploi. Il a commencé à me parler des syndicats. J’avais réagi en disant : « c’est bien gentil de parler de syndicats, mais les privés d’emplois ne sont pas concernés ». Il m’a répondu « il y’a des syndicats qui ont des comités de privés d’emploi comme la CGT et SUD ». Ce qui m’a donné envie de m’engager à leurs cotés, c’est que je suis issu du milieu ouvrier par mes parents, mon grand-père était a la CGT métallurgiste, j’ai participé à des manifs avec la JOC et j’ai pu voir que certaines revendications de la JOC et de la CGT sont communes. Dans l’Histoire du mouvement ouvrier, il y a eu beaucoup de prêtres ouvrier qui étaient syndiqués à la CGT et suivaient la doctrine sociale de l’Eglise. Je voulais faire ce lien entre ces deux mondes, mais aussi les valeurs que porte la CGT.
- Tu t’es syndiqué à la CGT Chômeurs, pourquoi c’était important pour toi ?
Je me suis syndiqué d’abord à la CGT, mais à Maubeuge où j’habitais, il n’y avait pas de comité de privés d’emploi et précaires, on m’avait proposé de travailler à créer un comité avec un autre militant de la CGT. A ce moment, j’animais déjà le CJPE de Maubeuge (JOC) qui me prenait du temps mais je participais aux manifs de la CGT. J’ai suivi la formation syndicale niveau 1. Arrivé à Saint-Etienne récemment, j’ai pris contact avec l’Union locale CGT et ils m’ont informé de l’existence d’un comité de privé d’emploi et précaires. Avec notre local dans l’Union local, nous sommes nombreux c’est encourageant. Pour moi c’est important, la CGT dit la société capitaliste nous prive de ce droit à travailler. Les privés d’emploi et précaires peuvent se mobiliser pour avoir de nouveaux droits et être défendus face à la casse organisée de notre système social. Les anciens se sont battus pour obtenir des droits pour les générations suivantes. Le MEDEF et le grand patronat en connivence avec cartains politiques veulent casser cette solidarité. Ils stigmatisent les privés d’emploi et précaires alors que la plupart des emplois sont précaires, qu’il y a bien plus de candidats que d’offre.
- Mercredi 30 janvier s’est déroulée une action syndicale dans le centre de contrôle des demandeurs d’emploi à laquelle tu as participé. Peux-tu nous raconter ?
C’était une action afin de protester contre le décret paru fin décembre et qui vise à contrôler et sanctionner davantage les demandeurs d’emploi inscrits à Pôle emploi. L’action s’est déroulée de façon surprise. Nous avons su le lieu à la dernière minute. Nous nous y sommes rendus en covoiturage. Cette action s’est faite par la CGT Privé d’emploi et précaire de Saint-Etienne, du Rhône, les comités de lutte CGT étudiants du Rhône, la CGT intermittents de Saint-Etienne et du Rhône. Nous sommes tous entrés en courant à l’intérieur. C’est un centre qui n’accueille pas de public, il contrôle (et radie) les demandeurs d’emploi par téléphone ou par internet. La direction a fait éteindre les ordinateurs et a évacué les salariés. Nous avons ensuite pu discuter avec le directeur local du centre, ensuite le propriétaire du bâtiment est intervenu pour nous expulser mais nous sommes restés. La gendarmerie a été appelé et elle est venue, on a négocié avec la gendarmerie et le directeur local du centre : on a demandé à voir le directeur régional de Pôle Emploi Auvergne-Rhône-Alpes afin de lui faire remonter nos revendications.
Nous sommes montés sur le toit de l’immeuble avec la banderole et des fumigènes, on a entamé des chants de la CGT. Nous voulions envoyer un message à la société et aux journalistes pour dire que nous sommes mobilisés et que des actions de ce type pourraient se faire encore jusqu’à ce que le décret s’annule. Nous ne voulons pas être stigmatisés par l’institution. On a mangé sur place en attendant la direction régionale et après notre repas nous avons rencontré la directrice régionale chargé des contrôles des demandeurs d’emploi et qui était adjointe au directeur régional de Pole Emploi Auvergne Rhône Alpes venue de Clermont Ferrand. Une délégation de camarades a été reçue. Durant ce temps, un camarade, membre d’un comité paritaire sur les privés d’emploi précaires et intermittents nous a fait un compte-rendu sur la réforme de l’assurance chômage et les négociations. Lorsque la délégation est revenue, la gendarmerie nous a fait évacuer et a procédé à un contrôle d’identité à la sortie du bâtiment. A l’extérieur, les journalistes avaient attendu plusieurs heures pour notre sortie du bâtiment (articles à lire dans Le Progrès et Libération). Nous avons ensuite fait le débriefing de l’action.
- Quelles étaient vos revendications ?
La première chose à savoir c’est que les privés d’emploi peuvent témoigner s’ils sont victimes de radiation à cette adresse alerteradiation@cgt.fr
Nos revendications sont le droit au travail et à un revenu de remplacement pour toutes les personnes privées d’emploi. Une augmentation minime de 0,1 point des cotisations patronales à l’assurance chômage permettrait d’indemniser 100 000 personnes supplémentaires, dont beaucoup de jeunes, dès deux mois de travail. Au contraire des sanctions, les travailleurs en recherche d’emploi ont besoin d’accompagnement et de soutien.
Les droits des privés d’emploi doivent, au contraire, êtres revalorisés en donnant les moyens de se former et de chercher un emploi sans avoir à se soucier en permanence de comment remplir le réfrigérateur. La nécessité d’accéder à un emploi stable en CDI et correctement rémunéré est une priorité pour chaque personne en recherche d’emploi.
Nos revendications pour que le montant du Smic brut, pour 35 heures, soit revalorisé à 1 800 euros par mois. Cette augmentation de 300 euros environ répond tout simplement aux besoins des salariés au Smic pour vivre un peu mieux et satisfaire leurs besoins les plus fondamentaux : se loger, se soigner, s’éduquer, s’alimenter, se reposer, communiquer, sortir, etc. et que s’ouvrent des négociations salariales dans les branches, les entreprises et les administrations.
Nous voulons un vrai Service public de l’emploi.
- Et toi, en tant que privé d’emploi, comment tu te sens touché par ce décret qui doit renforcer le contrôle vis-à-vis des demandeurs d’emploi ?
Je me sens touché par ce décret car je recherche activement du boulot et j’aurais peur de me faire radier car tu peux cumuler des droits. Même si tu recherche activement de l’emploi et que selon Pôle Emploi tu ne recherches pas assez ou que tu refuses deux offres qui ne te correspondent pas, tu peux te faire radier.
Pour aller plus loin :
- Communiqué de la JOC : “Décret Assurance chômage ; des emplois plutôt que des sanctions ! “
- Article : “Des nouvelles des comités de jeunes privés d’emploi “