Nahel, un jeune âgé de 17 ans, a été victime d’un tir policier à Nanterre lors d’un contrôle routier. Après l’annonce de son décès, de nombreux quartiers populaires à travers la France ont vécu plusieurs nuits d’émeute. Elles ont été marquées par des dégradations, des pillages et des incendies visant des biens publics : centres sociaux, écoles, mairies, commissariats, postes, médiathèques, bus, tramway… et privés : magasins, véhicules…
La Mission ouvrière, présente dans les quartiers populaires par ses membres investis dans la vie associative et ecclésiale, rappelle d’abord que la vie d’un jeune vaut plus que tout l’or du monde. Quand un jeune disparaît, une part de notre humanité est blessée, une part de notre avenir est compromise. Nous partageons la tristesse de la famille et des proches de Nahel. Et nous espérons que justice sera rendue à la mémoire de ce jeune homme.
De plus, la Mission ouvrière condamne avec force les actes de violence, d’où qu’ils viennent et quelle que soit leur nature : violence verbale, violence physique ou vandalisme. Nombreuses sont les personnes impactées :habitants des quartiers, commerçants, personnels des services publics, intervenants sociaux, élus municipaux, mais aussi jeunes vivant dans les quartiers populaires et particulièrement stigmatisés. Nelson Mandela disait à juste titre : « La grande colère et la violence ne peuvent jamais construire une nation. »
Il est nécessaire de chercher à comprendre les causes des violences urbaines pour éviter qu’elles se reproduisent. Nous voyons depuis des années une nette dégradation des conditions de vie, tant économiques que sociales, au sein des quartiers populaires, générant un sentiment de discrimination et de relégation en certains lieux qui, malgré les plans de rénovation, se ghettoïsent. Des rapports montrent combien il est compliqué pour les jeunes des quartiers populaires de trouver un emploi stable. Le chômage et la précarité professionnelle y sont donc plus importants qu’ailleurs, et la tentation du trafic de stupéfiants est plus forte. Pourtant, ils sont nombreux à faire des études, à chercher avec obstination un emploi, à travailler, et à donner du temps dans des associations ou des activités culturelles. Nous sommes témoins de la qualité de leur engagement. Beaucoup d’enfants, de jeunes et d’adultes des cités populaires ont même consacré leur énergie à jouer un rôle de médiation dans les situations de violence de ces derniers jours.
Les événements récents soulignent également l’importance des politiques publiques. Les propositions élaborées par de nombreux acteurs de terrain des quartiers, aux côtés de Jean-Louis Borloo en 2018, sont sans doute à réexaminer aujourd’hui. La remise en œuvre d’une police de proximité est une réponse possible. Mais il semble urgent d’augmenter le nombre d’éducateurs ainsi que les aides de fonctionnement aux associations qui soutiennent la vie dans les quartiers. Ces aides sont en baisse depuis une vingtaine d’années. Il est nécessaire de répondre aux besoins d’écoute, de considération et d’accompagnement des jeunes, des enfants et de leurs familles. Les émeutes confirment la nécessité de l’éducation à la citoyenneté et au vivre ensemble. Les parents en fragilité ont besoin non de sanctions mais de soutiens pour exercer leur autorité. Un mineur dans la rue est un mineur en danger.
Notre foi et notre espérance chrétienne nous engagent plus que jamais à agir pour une société fondée sur la fraternité et la justice sociale, bienveillante à l’égard des plus fragiles. Nous faisons nôtres ces paroles du pape François dans son encyclique sur la fraternité et l’amitié sociale (§ 55) : « L’espérance nous parle d’une soif, d’un désir de plénitude, de vie réussie, d’une volonté de toucher ce qui remplit le cœur et élève l’esprit vers les grandes choses comme la vérité, la bonté, la justice et l’amour ».
La Mission ouvrière regroupe les membres de l’Action catholique ouvrière, de la Jeunesse ouvrière chrétienne, de l’Action catholique des enfants, des Groupes de recherche et d’étude en pastorale ouvrière des prêtres, diacres, religieux-ses et laïcs missionnés en monde ouvrier et populaire.