Nous avons droit aux congés payés grâce au combat mené par les ouvrières et ouvriers, lors du Front Populaire, en 1936. Depuis, les congés payés ont augmenté : chaque salarié à temps plein cumule 2,5 jours de congés payés par mois. Est-ce que pour autant que le droit de partir en vacances est garanti pour tous et toutes ?
En 2014, 6 français et françaises sur 10[1] sont partis en vacances selon l’Observatoire des inégalités. Mais ce chiffre ne reflète pas une réalité similaire pour tous. En effet, 47% des ouvriers sont partis en vacances cette année-là, contre 82% des cadres supérieurs. Et cela est d’autant plus parlant chez les enfants de 5 à 19 ans : 5 enfants sur 100 de cadres supérieurs ne sont pas partis en vacances, contre 31 enfants d’employés et 34 d’ouvriers et ouvrières. Ces statistiques nous prouvent que nous ne sommes pas tous et toutes égaux face aux départs en vacances. Le milieu social dans lequel nous sommes nés y participe. S’il y a plusieurs raisons pour les non-départs en vacances, la situation financière en est la première cause (46%). Seuls 13% des personnes ne partent pas en vacances, par choix personnel.
Pour que certaines et certains puissent partir en vacances, d’autres travaillent !
Si celles et ceux qui partent peuvent bénéficier de vacances, c’est parce que d’autres travaillent. Quand on visite une ville, on dort au camping, on mange une glace sur la plage, on achète un souvenir… On le fait grâce au travail des saisonnières et des saisonniers ! Il y a encore une dizaine d’années, il était facile pour les jeunes de trouver un job saisonnier. Aujourd’hui, travailler l’été met autant en concurrence que pour un poste lambda. Le problème c’est qu’il s’agissait avant d’un emploi qui permettait d’avoir de l’argent de poche pour l’année, alors qu’aujourd’hui c’est la condition pour de nombreuses et nombreux étudiants d’accéder à la fac et se nourrir toute l’année. Depuis des décennies, la JOC agit auprès des jeunes saisonniers pour les informer de leurs droits, avec les Perm’Saisons !
Jeunes, en vacances, un parcours du combattant ?
La JOC a milité pour les congés payés : en 1950, elle a obtenu une deuxième semaine de congés payés pour les jeunes. Mais ce droit connait des modulations selon le contrat, comme pour les intérimaires. En effet, elles et ils ont le droit aux congés comme tous les autres salariés mais, elles et ils disposent d’une indemnité à hauteur de 10% de la rémunération brute totale pendant la mission. Généralement, les intérimaires ne prennent donc pas de vacances. S’ils souhaitent prendre des vacances, les congés seront déduits de leur paie…
Pour les jeunes privés d’emploi, c’est aussi la galère. Trop souvent sans fric, elles et ils ne disposent pas des moyens nécessaires pour pouvoir partir en vacances. Graziella, alors qu’elle était privée d’emploi, a pu partir en vacances : « J’ai eu des Chèques Vacances de la Mission Locale, j’ai dû faire un dossier qui est passé en commission où j’expliquais mon projet de vacances. J’ai fait le dossier pour Loïc (mon ami) et moi, on a eu 300€ de Chèques Vacances par personne, donc 600€. Cela m’a permis de partir en vacances 3 jours à Antibes dans le Sud. On a pu aussi aller dans un parc où on rêvait d’aller : Marineland. J’ai pris pour la première de ma vie l’avion, avec EasyJet ». Bénéficier d’une aide pour partir en vacances ne réduit pas les inégalités sociales. En effet, en 2014, seuls 11% des personnes sans diplôme ont pu être aidées, contre 25% des diplômés du supérieur[2]. A cela s’ajoute, une certaine culpabilité de profiter de la vie lorsque l’on est privés d’emploi. Lucie en témoigne : « Je suis obligée de cacher à mes proches que oui, j’ai été au ciné, oui j’ai été à un festival. Leur première question c’est : « avec quel argent ? », c’est hyper culpabilisant. Du coup, maintenant, je ne dis plus ce que je fais. ».
Pour les travailleurs et travailleuses, les difficultés existent aussi. Depuis quelques temps, la loi a été modifiée et ne permet plus d’obliger les salariés, restant dans une même entreprise, à travailler un an de suite pour pouvoir bénéficier de leurs congés payés. Toutefois, certaines entreprises continuent cette pratique, dérogeant au droit. Nicolas en a fait les frais : « mon entreprise m’a dit que je n’avais pas le droit de poser mes congés avant que j’aie fait un an dans la boite. C’était crevant mais je n’ai pas osé me battre pour pouvoir y avoir droit. ».
Alors, les vacances pour tous et toutes un droit à conquérir ?
Pour aller plus loin :
- Certaines régions touristiques ont un partenariat avec la SNCF pour des offres à prix réduits pour les jeunes. Tu peux regarder l’offre « l’Eter » pour les Hauts de France, où le ticket est à 2€ pour toute la région ou encore en Rhône Alpes, où tu peux bénéficier de 50% pour rejoindre certaines stations de ski.
- Si tu as entre 18 et 25 ans, tu peux bénéficier de Chèques Vacances, grâce à l’initiative à l’Agence Nationale pour les Chèques Vacances (ANCV). A toi de faire le choix de ton projet entre la montagne et la mer, tu peux avoir jusqu’à 150€ de chèques vacances pour une participation de 50€.
- Si tu veux baisser tes charges de location, tu peux faire du couchsurfing, grâce au site couchsurfing.com. Des volontaires te proposent gratuitement un canapé lit. Tu peux également aller dans une auberge de jeunesse, entre 10 et 20€ la nuit.
- Si ton employeur ne veut pas te donner tes congés avant un an de travail, renseigne-toi auprès d’un syndicat ou une Maison de Justice et du Droit pour faire valoir tes droits !
[1] Observatoire des inégalités
[2] Observatoire des Inégalités, les cadres supérieurs pouvant bénéficier des comités d’entreprise, contrairement aux personnes privés d’emploi
Article paru dans le numéro 166 d’Assez Zoné à télécharger ici